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JOURNAL

entrée à Nice, quand j’irai à la promenade des Anglais, le matin, sans chapeau, avec mes chiens.

Je suis içi comme une pauvre plante transplantée. Je regarde par la fenêtre et, au lieu de la Méditerranée, je vois de sales maisons ; je veux regarder par l’autre fenêtre et, au lieu du château, je vois le corridor de l’hôtel. Au lieu de l’horloge de la tour, j’entends la pendule de l’hôtel…

C’est vilain de prendre des habitudes et de détester le changement.


Mercredi 5 janvier. — J’ai vu la façade de San-Pietro, c’est superbe ; elle m’a ravi le cœur, surtout la colonnade gauche, parce qu’aucune maison ne la dépasse, et ces colonnes avec le ciel pour fond produisent l’effet le plus saisissant. On se croirait dans la vieille Grèce.

Le pont et le fort San-Angelo sont aussi d’après mon idée.

C’est grand, c’est sublime.

Et le Colisée !

Qu’ai-je à en dire après Byron ?…


Lundi 10 janvier. — Nous sommes allées chez Mgr de Falloux ; mais depuis vingt jours il ne quitte pas son lit. De là chez la comtesse Antonelli, mais elle a quitté Rome depuis dix jours. Enfin nous allons au Vatican. Je n’ai jamais vu les grands de près et je n’ai jamais su comment il fallait les aborder, néanmoins mon instinct me disait que nous ne faisions pas comme il fallait. Pensez, le cardinal Antonelli ; le pape de fait, sinon de nom, le ressort qui faisait mouvoir toute la machine papale et qui la soutient encore à présent !