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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

dant le portrait du pape Léon… je ne sais plus combien… X, je crois, est admirable.

Une « Vierge avec l’enfant Jésus » de Murillo, a attiré mon attention ; c’est frais, c’est naturel.

À ma grande satisfaction, j’ai trouvé la galerie des tableaux plus petite que je ne pensais. C’est assassinant, ces galeries sans fin, ce labyrinthe plus terrible que celui de Crète.

J’ai passé deux heures dans le palais, je ne me suis pas assise un instant et je ne suis pas fatiguée !… C’est que les choses que j’aime ne me fatiguent pas. Tant qu’il y a tableaux et surtout statues à voir, je suis de fer. Ah ! si on me faisait marcher dans les magasins du Louvre ou du Bon Marché, même chez Worth, alors je pleurerais au bout de trois quarts d’heure.

Aucun voyage ne m’a aussi satisfaite que celui-ci, je trouve enfin des choses dignes d’être vues. J’adore ces sombres palais Strozzi. Et j’adore ces portes immenses, ces cours superbes, ces galeries, ces colonnades. C’est majestueux, c’est grand, c’est beau !… Ah ! le monde dégénère ; on a envie de crouler sous terre en comparant les constructions modernes à ces pierres gigantesques entassées les unes sur les autres et montant jusqu’au ciel. On passe sous des ponts qui réunissent des palais à une hauteur prodigieuse…

Ô ma fille, ménage tes expressions ; que diras-tu de Rome ?