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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Depuis Antibes, je m’égosille à chanter des chansons niçoises, au grand ébahissement des employés des gares. Plus nous approchions, plus mon impatience croissait.

La voilà, cette Méditerranée après laquelle je soupirais ! Ces arbres noirs ! Et il fait justement un clair de lune qui illumine ce chemin dans la mer.

Calme parfait ; ni roulement de voiture ni mouvement perpétuel de ces hommes qui me paraissaient des petits bonshommes, de ma fenêtre du Grand-Hôtel. Calme, silence, obscurité mal éclairée par la lune qui se cache ; à peine quelques lanternes qui courent les unes après les autres.

J’entre dans ma chambre, dans mon cabinet de toilette ; j’ouvre la fenêtre pour voir le château, toujours le même, et l’heure sonnait, je ne sais plus quelle heure, et mon cœur s’est serré !

Ah ! je puis bien nommer cette année : l’année des soupirs ! Je suis un peu fatiguée, mais j’aime Nice !… j’aime Nice !


Vendredi 10 septembre (Voyage à Florence). — Les moustiques m’ont réveillée dix fois la nuit ; mais je me réveille un peu pâle, et à mon aise. Ah ! les Anglais savent bien ce qu’ils entendent par Home. Quelle qu’elle soit, la maison est l’endroit le plus agréable ; ça ne tient ni au confortable ni à la richesse, car voyez notre maison, tout est sens dessus dessous, à peine les meubles nécessaires, désordre, désolation, et pourtant j’y suis bien : c’est que je suis chez moi, à moi, à moi !…

Je ne pense pas même à mes robes, je trouve tout