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JOURNAL

artistique, a trouvé beaucoup de bon dans mes esquisses et a désiré beaucoup faire mon portrait ? FLORENCE.

Samedi 12mai. — Mon ceur se serre de quitter Florençe…

Aller à Nice ! Je m’y prépare comme pour traverser un désert, je voudrais me raser la tête pour ne pas aroir la peine de me coiffer. On emballe, on part ! L’encre sèche sur ma plume jusqu’à ce que je me décide à écrire un mot, tant les regrets m’obsèdent.

NICE. — Mercredi 16 mai.— J’ai couru toute la matinée chercher quelques bagatelles qui manquent à mon antichambre, mais dans ce fichu pays on ne trouve rien. J’ai eu recours à un peintre de vitraux d’église, à un ferblantier, à qui sais-je ? L’idée que mon journal ne’sera pas intéressant, I’impossibilité de lui donner de l’intérêt en ménageant des surprises, me tourmentent, Si je n’écrivais que par intervalles, je pourrais peut-être… mais ces notes de chaque jour ne trouveront patience que chez quelque penseur, quelque grand observateur de la nature humaine… Gelui qui n’aura pas la patience de tout lire ne pourra rien lire et surtout rien comprendre. Heureuse dans mon nid bien doux et bien élégant, dans mon jardin fleuri. Nice n’existe pas, je suis à la campagne chez moi.

NICE. —-— Mercredi 23 mai. —— Oh ! quand je pense qu’on ne vit qu’une fois et que chaque minute nous rapproche de la mort, je deviens folle !  ! Je ne crains pas la mort, mais la vie est si courte, que la gaspiller est une infamie !  !