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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

ment de son arrivée, je me suis trouvée sur l’escalier et comme il arrivait en face de moi, je dis : Deux mots, Sire, de grâce. Qu’est-ce vous désirez ? Rien absolument, Sire, que pouvoir me vanter toute ma vie d’avoir parlé au Roi le plus aimable et le meilleur du monde. Vous êtes bien bonne, je vous remercie beaucoup, C’est absolument tout, Sire. Je’vous remercie bien, je ne sais comment vous remercier, vous êtes bien bonne. Et il m’a serré la main gauche avec ses deux mains. Circonstance à la suite de laquelle je me gante pour huit jours. C’est à cause de mes gants que j’écris comme vous voyez. J’aurai des ongles superbes dans huit jours.

Que dites-vous de moi ? Je n’étais pas trop effrayée. En faisant ce que j’ai fait, j’avais tout prévu, excepté moi. A une autre, cette extravagance aurait rapporté un tas de choses charmantes ; à moi, un tas de désagréments. Je suis vouée aux infortunes. Doenhoff est revenu du palais où le Prince a été rendre la visite du Roi. L’aide de camp du Roi a dit : « Quelle drôle de manière de cette jeune fille de se trouver sur le passage du Roil » Et le prince de Prusse dit au Roi que les jeunes filles en Russie sont très exaltées pour la famille royale, qu’elles font des folies pour l’Empereur et qu’elles sont aussi pures que les anges du ciel. — Merci, charcutier ! Doenboff a dit un tas de choses. Enfin, il est venu nous rassurer.

Après une agitation, une stupeur et une terreur folle, je commence à revenir à moi. Je’ai jamais de ma vie été si effrayée. En une heure, j’ai vécu deux anN. B.

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