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JOURNAL

d’un catarrhe, d’une laryngée chronique, etc. (ce dont je ne doute pas, vu le mauvais état de ma gorge) et que pour guérir il.me faut six semaines de traitement énergique. Ce qui fait que nous passerons l’hiver à Paris, hélas !

C’est mon père qui est charmant ! D’abord il m’a fait dépenser de l’argent pendant que j’étais chez lui ; ensuite il n’a pas payé mon voyage, et, comme il avait honte, il appela l’oncle Alexandre, se prit à l’embrasser et à l’assurer qu’il me rendrait mes dépenses. II pouvait ne pas le dire, on ne lui demandait rien. Ensuite il permit à son Kouzma d’accompagner ses chevaux de malheur. J’ai payé le trajet et Kouzma. Et à présent voilà que maman décachète une lettre de cet homme à mon père.

« J’attends vos ordres, Monsieur, arrêté au milieu du chemin. Quant à Chocolat, je l’ai, toujours selon vos ordres, renvoyé à Pollava. » Sans compter que mon cher père m’a forcée de donner 500 roubles à Kouzma, que Kouzma est en train de manger en route.

Voilă, sur ma foi, un beau cadeau ! — — « Vous avez éloigné de votre fille tout le monde, pour qu’on pût dire qu’on n’en avait pas voulu. Vous l’avez cachée, car vous ne vouliez pas qu’on la vit telle qu’elle est, n’ayant pas vous-même donné un sou pour son éducation ? » disait maman. Et il répondait par des petites plaisanteries plates et révoltantes, sans jamais nier ou s’expliquer.

Vendredi 1er décembre. — Hier nous avons quitté Paris.Maman, avec ses trente-six paquets, me réduisait au désespoir. Ses cris, ses alarmes, ses boites sont d’une bourgeoisie écceurante…