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JOURNAL

Cette vie m’horripile. Dieu ! Seigneur Jésus ! tirezmoi de là.

Vendredi 29 septembre. il me semblait que j’étais pour toujours énchainée en Russie ; cela m’exaspérait, j’étais prête à grimper au mur et j’ai pleuré amèrement. La mère de Pacha me gêne. Pourquoi ? Parce qu’elle a dit plusieurs choses par lesquelles je vois en quels termes exaltés son fils lui a parlé de moi. Et enfin, comme j’insistais pour qu’elle le fit venir, elle me dit, moitié riant, moitié sérieusement : Non, non, il faut qu’il reste là-bas. Tu t’ennuies ici et, n’ayant rien à faire, tu le tourmentes ; revenu tout écrasé et étourdi. — J’étais si désespérée hier, —

m’est Ce à quoi je répondis avec beaucoup de candeur : — Je ne pense pas que Pacha soit homme à s’offenser de quelques plaisanteries amicales. Si je plaisante et le taquine un peu, c’est qu’il est mon proche parent, presque mon frère. Elle m’examina longtemps et dit : Savez-vous ce qui est le comble de la folie ? Non.

— — C’est de devenir amoureux de Moussia. Rattachant instinctivement cette phrase à d’autres et à d’autres encore, je rougis jusqu’aux oreilles. Dimanche 1er octobre. Nous avons été chez le prince Serge Kotchoubey. Mon père s’était fait beau, si beau qu’il avait même des gants un peu trop clairs. J’étais en blanc comme aux courses de Naples ; seuIement j’avais un chapeau tout en plumes noires, de cette forme du classique comme il faut, russe, que