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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Comment ? Mais… hum ! c’est-à-dire que si tu te débarrasses de quelques brusqueries insignifiantes (d’ailleurs j’en ai aussi dans mon caractère), tu seras une perfection et un vrai trésor.

C’est-à-dire que… Enfin ceux qui connaissent l’homme peuvent seuls apprécier la portée de ces mots. Et ce soir encore il m’a entourée de ses bras et m’embrassant (chose inouïe, à ce que dit Paul), tendrement, il dit :

Vois, Michel, voyez tous quelle fille j’ai !… Voilà une fille qui mérite d’étre aimée. N’est-ce pas, papa ? Je suis un trésor. Michel, repris-je, je vous promets de vous marier avec ma fille ; pensez donc à l’honneur : ce sera peut-être une princesse du sang.

J’écris de Poltava. — Il pleut depuis ce matin, et lorsqu’il a fallu monter cette satanique montagne qui se trouve à mi-chemin, les chevaux refusèrent presque d’obéir ; mon père prit place sur le síège, le cocher descendit et nous accompagna, courant dans la boue et fouettant les chevaux qu’il a fallu mettre au galop pour ne pas leur donner le temps de réfléchir sur la difficulté. Le bruit des clochettes, les claquements du fouet, les cris du valet, du cocher et de papa, l’étonnement muet de Chocolat… c’était un spectacle exci tant ; il me rappelait une course vivement disputée tirant à sa fin.

On arriva en ville à huit heures. Droit chez le prince, qui partit ce matin à cinq heures pour mettre sa maison en état, –

Une petite maison fort simple à l’extérieyr, mais charmante à l’intérieur. Rien n’était fini encore ;

le tapis était posé, les lampes, les glaces, les lits, et les vins achetés et placés. M. B.

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