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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Avec une rapidité étonnante j’ai esquissé deux portraits, mon père et Paul, cela a duré trente-cinq minutes. Combien

de femmes en ce monde Ne pourraient pas en dire autant ! Mon père, qui estimait mon talent comme une vaine vantardise, le reconnut et fut content ; et moi, transportée, car peindre c’est marcher vers un de mes buts. Chaque heure passée en dehors de cela ou de la coquetterie (car la coquetterie mène à l’amour’et l’amour & un mariage peut-être) me tombe comme un poids sur la tête. Lire ? non ! Agir ! oui. Ce matin, mon père entra chez moi et, après quelques phrases ordinaires, Paul étant sorti de la chambre, il se fit un silence pendant lequel je sentais que mon père avait quelque chose à dire, et comme je voulais parler de la même chose, je me suis tue exprès, tant pour ne pas commencer que pour avoir le plaisir de voir l’hésitation et l’embarras d’un autre que moi. Hum 1… alors,… que dis-tu ? demanda-t-il enfin.

Moi, papa ? Rien. — Hum1… tu as dit… Hum !… Que je vienne avec toi à Rome… Hum !… alors comment ? — Mais toul simplement. — Mais…

Il hésitait en tourmentant mes brosses et mes peignes.

Mais si je viens avec toi… Hum !… et maman… elle ne viendra pas ? Et alors… vois-tu, si elle ne vient pas… Hum !…, comment faire ? Ah ! ah ! fichu père ! Nous y sommes. C’est toi qui hésites… adorable ! C’est fort bien !