Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 1.pdf/291

Cette page n’a pas encore été corrigée
288
JOURNAL

J’ai parlé de meubles, de voitures, de livrée, du service d’une maison. Et je me plaisais à voir comme mon père gobait mes paroles, et me faisait diverses questions, oubliant sa fierté et sa réserve. Gritz parla beaucoup, comme un garçon sans esprit, mais homme du monde et connaissant tout le monde. J’avais toutes mes photographies en main et il me pria tant de lui en donner une. Je ne sais pas refuser, et puis, c’est un ancien ami, je lui en ai donné une. Mais j’ai refusé la petite carte-médaillon pour laquelle il était prêt à donner « deux années de sa vie. » Ah ! Dio mio !

Vendredi 25 août (13 août). —M… et Michel partirent après déjeuner.

Mon père proposa alors une promenade à Pavlovsk, son autre bien.

Il est parfait pour moi, mais aujourd’hui je suis nerveuse et je parlais peu, le moindre exercice oratoire me ferait fondre en larmes. Mais, pensant à l’effet que ferait sur maman cette complète absence de fète et de pompe, je dis à mon père que je voulais du monde et des fêtes, que je trouvais ma position étrange et même ridicule. — Eh bien,. répondit-il, si tu le veux, ce sera fait ! Veux-tu que je te mène chez la préfète ? Je le veux.

— Eh bien, ce sera fait. Rassurée sur ce sujet, je pus tranquillement visiter les travaux de la ferme et même entrer dans les détails, ce qui ne m’amusait guère, mais pouvait me servir à dire un jour un mot de connaisseur sur ce ménage, et étonner quelqu’un en parlant des semailles d’orge et des qualités du blé, à côté d’un vers