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JOURNAL

irompe. Il a des cl : eveux gris… il est en uniforme… il a passé soixante ans. Moi qui arrachais les mots de sa bouche avec une avidité croissante, je fus refroidie. Quel uniforme ? demandai-je, c’est singulier…il n’est pas militaire.

Non, pour sûr ! Non, mais alors, quel est cet uniforme ? Etrange ; pas de notre pays… c’est… C’est ?…

C’est un habit d’ecclésiastique… Attendez… Il occupe un rang très élevé, il domine les autres, c’est un évêque… non ! c’est un cardinal. Je fis un soubresaut et lançai mes mules à l’autre bout de la chambre. Mme de M… se tordait de rire en voyant mon excitation. Un cardinal ? répétai-je. Oui.

Quelle est sa pensée ? Il pense à une très grave affaire, il est fort occupé ! La lenteur d’Alexis et la difficulté qu’il semblait avoir à prononcer les paroles me rendaient nerveuse. Allez, voyez bien avec qui il est ? que dit-il ? — Il est avec deux jeunes gens… militaires, deux jeunes gens qu’il voit souvent, qui sont du pålais. J’ai toujours vu dans les audiences du samedi deux militaires assez jeunes qui se trouvaient parmi la suite du pape.

Il leur parle, continua Alexis, il leur parle une langue étrangère… italien ! Italien ?

Ah ! mais il est très instruit, ce cardinal, il saik presque toutes les langues d’Europe… — Le voyez-vous en ce moment ?