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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

qui avaient essayé de le guérir ne l’avaient pas pu, et Jésus leur répondit : — C’est à cause de votre incrédulité, car, je vous le dis en vérité, si vous aviez de la foi aussi gros qu’un grain de moutarde, vous diriez à cette montagne : — « Transporte-toi d’ici là », et elle s’y transporterait et rien ne vous serait impossible.

À la lecture de ces paroles, je fus comme illuminée, et pour la première fois peut-être j’ai cru en Dieu. Je me levai, ne me sentant plus ; je joignais les mains, je levais les yeux, je souriais, j’étais en extase.

Jamais, jamais je ne douterai plus, non pas pour mériter quelque chose, mais parce que je suis convaincue par ce que je crois.

Jusqu’à l’âge de douze ans on m’a gâtée, on a fait toutes mes volontés, mais on n’a jamais songé à mon éducation. À douze ans j’ai demandé des maîtres, on m’en donna, et j’ai rédigé le programme moi-même. Je dois tout à moi-même…

Après cet élan enthousiaste, j’eus peur de tomber dans l’exagération, peur du couvent. Oh ! non, j’étais transformée, j’étais joyeuse ; je dormis bien, je me réveillai plus calme.


Lundi 5 juin. — Dina, Mlle Colignon et moi, nous sommes restées jusqu’à dix heures sur ma Terrasse par un clair de lune reflété dans la mer tout unie. Je discutais sur l’amitié et sur les rapports qu’on doit avoir avec ses semblables ; j’ai fait ma profession de foi. C’est venu à propos des Sapojenikoff qui n’ont pas encore écrit.

On sait l’admiration de Colignon pour eux, d’ailleurs elle a besoin d’adorer quelqu’un ; elle est la femme la plus romanesque et la plus sentimentale