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JOURNAL

aura pas au monde un homme plus heureux que vous.

— Alors, nous nous marierons. Soyez ma femme.

Je souris.

— Ah ! s’écria-t-il en bondissant par la chambre, comme je serai heureux, comme ce sera drôle quand nous aurons des enfants !

— Vous êtes fou, monsieur.

— Oui, d’amour.

En ce moment, on entendit des voix dans l’escalier, je m’assis tranquillement et attendis ma tante, qui entra aussitôt.

J’avais un grand poids enlevé de mon cœur, je devins gaie, et A… ravi.

J’étais calme, heureuse, mais j’avais bien des choses à dire et à entendre.

Excepté notre appartement, tout le premier de l’hôtel est vide. Le soir nous prenons une bougie et parcourons ces immenses appartements parfumés encore de l’ancienne grandeur des palais italiens, mais ma tante est avec nous. Je ne savais comment faire.

Nous nous arrêtons pendant plus d’une demi-heure dans un grand salon jaune, et Pietro imite le Cardinal, son père et ses frères.

Ma tante s’amuse à faire écrire à A… des bêtises en russe.

— Copiez cela, dis-je en prenant un livre et en écrivant sur la première page.

— Quoi ?

— Lisez.

Je lui ai indiqué les huit mots que voici :

« Partez à minuit, je vous parlerai en bas. »

— Compris ? demandai-je en effaçant.

— Oui.