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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Jeudi 11 mai. — Comme je l’ai dit mardi soir, je suis partie hier à deux heures avec ma tante.

C’est une terrible preuve d’amour que j’ai l’air de donner à Pietro.

Ah ! ma foi, tant pis ! S’il croit que je l’aime, s’il croit à une pareille énormité, il n’est qu’une bête.

À deux heures, nous sommes à Rome, je me jette dans un fiacre, ma tante me suit, le conducteur de l’hôtel de la ville prend les bulletins et… et… je suis à Rome ! Dieu ! quelle joie !

Nos bagages n’arriveront que demain. Pour aller voir le retour des courses, nous sommes obligées de nous contenter de nos hardes de voyage. D’ailleurs, j’étais très bien avec mon costume gris et mon feutre. Je mène ma tante au Corso ! (Quelle chose adorable que de revoir le Corso après Nice !) Je l’abasourdis de bêtises et d’explications, car il me semble qu’elle ne voit rien.

Et voilà le Caccia-Club, il y a eu frémissement à mon passage ; le moine reste bouche béante, puis ôte son chapeau et sourit jusqu’aux oreilles.

Nous allons à la villa Borghèse, où il y a le concours régional d’agriculture.

Nous parcourons à pied l’exposition, nous admirons les fleurs et les plantes, et rencontrons Zucchini. Il y a encore du monde.

On est très surpris de me voir apparaître pour la troisième fois. À Rome, je suis très connue.

Simonetti s’approche ; je le présente à Mme Romanoff et lui dis que c’est par un merveilleux hasard que je suis ici.

Je fais signe à Pietro de venir ; il est tout rayonnant et me regarde avec des yeux qui prouvent bien qu’il a pris tout au sérieux.