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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Est-ce qu’il ne fait rien pour revenir ? Est-ce qu’il ne casse pas tout ? Est-ce qu’il ne crie pas ?

Mon Dieu ! je me suis confessée, j’ai reçu l’absolution et je jure et j’enrage.

Un certain volume de péché est aussi nécessaire à l’homme qu’un certain volume d’air pour vivre.

Pourquoi les hommes restent-ils attachés à la terre ? Pourquoi le poids de leur conscience les y attache-t-il ? si leur conscience était pure, ils seraient trop légers et s’envoleraient vers les cieux comme les ballons rouges.

Voilà une théorie bizarre. N’importe !

Et Pietro ne revient pas.

Mais puisque je ne l’aime pas ! Je veux être raisonnable, tranquille, et je ne peux pas.

C’est la bénédiction et le portrait du pape qui m’ont porté malheur.

On dit qu’il porte malheur.

Il y a je ne sais quel sifflement dans ma poitrine, j’ai les ongles rouges et je tousse.

Il n’y a rien de plus affreux que de ne pouvoir prier. La prière est la seule consolation de ceux qui ne peuvent pas agir. Je prie, mais je ne crois pas. C’est abominable. Ce n’est pas ma faute.


Lundi 10 avril. — Ils l’ont enfermé pour toujours… Non, ils l’ont enfermé pour le temps que je suis à Rome.

Demain, je vais à Naples, ils ne peuvent pas prévoir ce truc. D’ailleurs, une fois relâché, il ira me retrouver.