Pourquoi diable est-ce A… au lieu d’un autre ?
Et je répète toujours la même phrase en changeant le nom.
Samedi 18 mars. — Je n’ai jamais eu un instant de tête-à-tête avec A… ; cela m’ennuie. J’aime à l’entendre me dire qu’il m’aime. Depuis qu’il m’a dit tout, je reste les coudes appuyés sur la table et je pense. J’aime peut-être. G’est lorsque je suis fatiguée et à moitié endormie que je crois aimer Pietro. Pourquoi suis-je vaine ? Pourquoi suis-je ambitieuse ? Pourquoi suis-je raisonnable ? Je suis incapable de sacrifier à un instant de plaisir des années entières de grandeur et de vanité satisfaite.
Oui, disent les romanciers, mais cet instant de plaisir suffit pour éclairer de ses rayons toute une existence ! Oh ! que non ! À présent j’ai froid et j’aime, demain j’aurai chaud et je n’aimerai pas. Voilà à quels changements de température tiennent les destinées des hommes.
En s’en allant, A… dit « Bonsoir », et me prend la main qu’il tient dans la sienne, tout en me faisant dix questions pour prolonger le temps.
J’ai raconté de suite cela à maman ; je raconte tout.
20 mars. — Je me suis bêtement conduite ce soir.
J’ai parlé bas avec le garnement et donné tout lieu de croire à des choses qui ne seront jamais. Avec tout le monde il ne m’amuse pas ; quand nous sommes à deux, il me parle amour et mariage. Le fils de prêtre est jaloux et furieusement jaloux, de qui ? de tout le monde.
J’écoute ses discours en riant du haut de ma froide