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JOURNAL

bouquets à la tête de cet homme qui, s’animant à son tour, commença à nous en lancer.

J’étais protégée par le Cardinalino et Plowden, et les bouquets, je devrais plutôt dire les balais, tombaient tout autour de moi. On finit par casser une vitre et une lanterne. C’était plein d’intérêt.

B… m’offre une grande corbeille de fleurs ; il rougit et se mord les lèvres ; je ne sais vraiment ce qu’il a. Mais laissons cet ennuyeux personnage et revenons aux yeux de Pietro A…

Il a des yeux adorables, surtout lorsqu’il ne les ouvre pas trop. Sa paupière, qui recouvre la prunelle au quart, donne à ses yeux une expression qui me monte à la tête et me fait battre le cœur.


Dimanche 5 mars. — À la villa Borghèse, il y a une grande course ; un homme qui s’engage à faire quarante fois le tour de la place de Sienne, dans la villa même, en une heure cinq minutes. Grand concours de monde, sans doute, à la tête duquel se trouve la ravissante princesse.

Zucchini est là, il me fait rire. Doria et une foule d’autres. Cela me rappelle les courses de chevaux, et tout ce monde qui se promène sur l’herbe est d’un effet très gracieux.

Pan ! j’aperçois le Cardinalino et me détourne pour parler à Debeck, parce que je sens que je rougis.

— Bonjour, mademoiselle, dit-il en arrivant.

— Bonjour, monsieur.

Voilà deux personnes qui existent pour moi, l’une indépendamment de l’autre, Doria et A…

Doria, majesté, glace et terreur.

A…, gaieté, coquetterie et charme.

Pietro A… me plaît visiblement.