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LE PRÊTRE EXILÉ.


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ARGUMENT.


C’est une sorte de royauté sainte que le sacerdoce en Bretagne ; on dirait que les descendants des anciens Celtes ont conservé aux prêtres catholiques la vénération que leurs pères avaient pour leurs druides. Mais, a ce sentiment, le christianisme en joint un autre que lui seul pouvait inspirer : l’attachement réciproque des fidèles et du prêtre. Si, en effet, ceux-là aiment leur pasteur comme un père (l’expression n’est pas trop forte), celui-ci leur dévoue sa vie, et reporte sur eux la tendresse qu’il eût vouée a des enfants selon la chair. Cet attachement mutuel éclata surtout pendant la révolution. Nous allons, tout à l’heure, entendre les paysans bretons s’écrier qu’ils « se sont levés pour détendre leur pays et leurs prêtres ; » écoutons d’abord le prêtre lui-même.

Parmi les ecclésiastiques bretons que le refus de serment à la constitution civile du clergé jeta sur les côtes d’Angleterre, d’Espagne ou de Portugal, se trouvait l’abbé Nourri, recteur de la paroisse de Bignan, dans l’évêché de Vannes ; il composa, sur son exil et les malheurs de son pays, une élégie touchante qu’il adressa à ses paroissiens. Son chant n’est point, il est vrai, conçu dans la forme ordinaire des poésies populaires ; mais, comme il jouit d’une extrême popularité, on ne l’exclura pas de ce recueil.

Il m’a été chanté par une vieille femme de Bignan. Les imprimeurs bretons l’ont tronqué, selon leur habitude, dans les versions qu’ils en ont données au public.