ton : « Le poëte est plus fort que les trois choses les plus fortes : le mal, le feu et la tempête. C’est qu’en effet il a des chants pour calmer toutes les douleurs : si la contagion a fait des orphelins ; si l’incendie a dévoré le toit d’un pauvre laboureur, si la barque de quelque pêcheur a sombré, il va, de village en village, suivi des victimes du désastre, quêter pour elles en chantant leurs malheurs. Depuis longtemps les hommes éclairés de la Bretagne ont vu le parti qu’on pouvait tirer pour l’amélioration du peuple de ce puissant levier moral ; le clergé et l’administration ont souvent appelé à leur aide l’enseignement par la chanson.
Son importance devait aussi, tôt ou tard, frapper les hommes d’État auxquels est confiée l’instruction publique en France. Il était réservé à un ministre dont l’esprit élevé saisit et exécute vile tout ce qui peut contribuer aux progrès des saines doctrines de prendre, cette fois encore, une éclatante initiative. En publiant l’arrêté[1] par lequel il est formé des commissions chargées de réunir les poésies consacrées à Dieu, à la religion, à ses souvenirs, à ses préceptes, que chante le peuple dans chacune des provinces de France ; toutes celles qui concernent les faits éclatants de l’histoire nationale ; tous les chants traditionels de nature à apprendre au peuple des villes et des campagnes à aimer Dieu, son pays et ses devoirs ; en publiant cet arrêté, M. de Salvandy acquiert de nouveaux titres à l’estime de tous les vrais amis des classes populaires.
Les réunions qu’on fréquente le plus en Bretagne pour entendre les chanteurs, sont les foires, les fêtes des noces et de l’agriculture, les nuits funèbres où l’on veille et prie autour d’un lit de mort, les liniéries où l’on tire le lin,
- ↑ Moniteur du 22 mai 1843