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De ce principe découle une vérité importante, admise aujourd’hui par les juges les plus compétents en fait de poésie populaire[1], et qui doit servir de base à tout ce qui suivra, savoir : que les poëtes populaires sont, en général, contemporains de l’événement, du sentiment, ou de la tradition ou croyance religieuse dont ils sont l’organe, et que, par conséquent, pour trouver la date de composition de leurs œuvres, il faut chercher à quelle époque appartiennent soit les événements et les personnages qu’ils mentionnent, soit les sentiments qu’ils expriment, soit enfin les opinions ou traditions pieuses qu’ils consacrent.

Le jugement de la critique s’appuie sur le témoignage des poëtes populaires eux-mêmes.

« Comme je ne sais point lire, dit un chanteur grec, pour ne point oublier cette histoire, j’en ai fait une chanson, afin d’en conserver le souvenirs.[2] »

« Celui qui vous chante cette chanson, dit l’auteur de la Bataille de Morat, peut maintenant se nommer, il a été lui-même témoin de ce qu’il raconte, il s’appelle Jean Ower[3]. »

Cette vérité s’applique, dans sa généralité, aux trois genres de compositions populaires de la Bretagne précédemment indiqués ; les écrivains du moyen âge la proclamaient comme nous la proclamons aujourd’hui.

« Les Bretons, disait Marie de France, au treizième

  1. Fauriel, Chants populaires de la Grèce moderne, introduction, passim ; M. J. J. Ampère, Histoire littéraire de la France, t. I, p. 24 ; MM. Grimm, Deutsche Haus und Kindermarchen, introduction, passim ; M. Rus, Edda, p. 64 ; M. Wolf, Uber de Lays, p. 359.
  2. Histoire de Georges Katoverga, Chants populaires de la Grèce moderne, t. II.
  3. 3X. Marmier, Chants de guerre de la Suisse. (Revue des Deux-Mondes, 4e série, p. 215, 1836.)