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le sanctuaire, l’invasion de la musique profane, ou comme si elle y était déjà entrée, ils prescrivaient au clergé de Bretagne d’avoir une manière de chanter uniforme[1].

Gildas, en s’élevant contre les prêtres d’Armorique « qui prennent plaisir à écouter les vociférations de ces poëtes populaires, colporteurs de fables et de bruits ridicules, plutôt que de venir entendre, de la bouche des enfants du Christ, de suaves et saintes mélodies[2], » non-seulement confirme l’autorité de Taliesin, lorsque le barde appelle les ménestrels des conteurs de nouvelles, mais encore nous révèle dans la poésie armoricaine du sixième siècle un troisième genre, non plus l’œuvre des bardes, ou des ménestrels profanes, mais des poëtes ecclésiastiques.

À ce dernier genre appartenaient ces hymnes traduites de l’hébreu que chantaient sous leurs voiles, dans la traversée, les exilés de l’île de Bretagne en Armorique ; les poëmes religieux de saint Sulio ; les cantiques que la mère d’Houarvé enseignait à son fils, et ces légendes rimées que répétait le peuple dans les cathédrales peu d’années après la mort des saints[3].

Les Bretons d’Armorique avaient donc, au sixième siècle, une littérature contenant trois genres très-distincts de poésie populaire, à savoir : des chants mythologiques, héroïques et historiques ; des chants domestiques et d’amour ; des chants religieux et des vies de saints rimées.

  1. Ut intra provinciam, psallendi una sit consuetudo. (Concil, ren., ap D. Morice. Histoire de Bretagne, pr., t. I, p. 184.
  2. Præconum ore ritu bacchantium concrepante..... ad ludicra et ineptas sæcularium fabulas strenuos et intentos... Canora Christi tyronum, voce suaviter modulante. (Gildas, Epist., p. 13 et 22 ap. Gale.)
  3. Vita Sancti Dubritii, ap. Joh. Price, Hist. Brit., p. 127.