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JEANNE DE MONTFORT,


ou


JEANNE-LA-FLAMME.


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ARGUMENT.


Depuis la fin du douzième siècle, la Bretagne avait cessé d’être gouvernée par des chefs de nom et de race bretonne. Deux partis la divisaient : l’un français, qui travaillait pour établir la suprématie de la France ; l’autre anglo-normand, qui combattait pour faire prévaloir les intérêts de l’Angleterre. En l’année 1341, la famille de Blois représentait le premier, et celle de Montfort le second. Les de Blois eurent d’abord l’avantage : Jean de Montfort, troisième du nom, reconnu par les états pour légitime duc de Bretagne, assiégé dans la ville de Nantes, fut pris par le frère du roi de France, et conduit prisonnier à Paris. Mais la captivité du duc ne devait pas abattre pour longtemps le courage de son parti : une femme, qu’on a justement surnommée la Clorinde du moyen âge, le releva. Prenant entre ses bras son fils encore enfant, et se présentant avec lui au milieu de ses barons consternés : « Montfort est pris, leur dit Jeanne de Flandre, mais rien n’est perdu, ce n’était qu’un homme ; voici mon fils, qui sera, s’il plaît a Dieu, son restorier, et vous fera du bien assez. » Puis elle s’enferma dans Hennebont que Charles de Blois attaqua vainement ; elle fit lever le siège aux Français, et rétablit les affaires de son mari.

L’incroyable audace dont cette femme extraordinaire donna des preuves au siège d’Hennebont, en allant elle-même mettre le feu au camp ennemi, l’a fuit surnommer par le peuple Jeanne-la-Flamme. C’est ce qu’atteste le récit poétique de cette héroïque expédition. Il m’a été chanté pour la première fois, comme le chant suivant sur la bataille des Trente, qui appartient à la même époque, par un aveugle de Plounevez-Kintin, connu sous le nom de Guillarm Arfoll.