Page:Barzaz Breiz 4e edition 1846 vol 1.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



SUBMERSION DE LA VILLE D’IS.


______


ARGUMENT.


Il existait en Armorique, aux premiers siècles de l’ère chrétienne, une ville, aujourd’hui détruite, à laquelle l’Anonyme de Ravennes donne le nom de Keris ou de ville d'Is. A la même époque, c’est-à-dire vers l’an 440, régnait dans le même pays un prince appelé Gradlon-veur, ou le Grand, par l’auteur d’un catalogue dressé au sixième siècle. Gradlon eut de pieux rapports avec un saint personnage, nommé Gwénolé, fondateur et premier abbé du premier monastère élevé en Armorique. Voilà tout ce que l’histoire authentique et contemporaine nous apprend de cette ville, de ce prince et de ce moine ; mais la tradition populaire, toujours plus riche que l’histoire, nous fournit d’autres renseignements. Selon elle, la ville d’Is, capitale du roi Gradlon, était défendue contre les invasions de la mer par un puits ou bassin immense,, destiné à recevoir les eaux de l’Océan dans les grandes marées, comme autrefois le lac Mœris celles du Nil. Ce puits avait une porte secrète dont le roi seul avait la clef, et qu’il ouvrait ou fermait lui-même quand cela était nécessaire. Or, une nuit, pendant qu’il dormait, la princesse Dahut, sa fille, voulant couronner dignement les folies d’un banquet donné à un amant, lui déroba la clef du puits, courut ouvrir la porte, et submergea la ville. Saint Gwénolé l’avait prédit.

Un paysan de la paroisse de Trégunk, appelé Thomas Penvenn, m’a chanté le premier les fragments qu’on va lire.