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élevée dans l’Ile de Bretagne, la laie et les pommiers auraient été l’objet du culte des insulaires païens : « L’endroit, dit-il, où fut bâtie l’église, s’appelait l’antique sanctuaire du pommier. Au milieu, s’élevait un de ces arbres, et dessous, une laie allaitait ses petits[1].

Un autre agiographe du douzième siècle, parlant de la conversion des Bretons au christianisme, ajoute : « Un ange apparut en songe à l’apôtre du midi de l’île de Bretagne, et lui tint ce langage : Partout où tu trouveras une laie couchée avec ses petits, tu bâtiras une église en l’honneur de la sainte Trinité[2]. »

Deux poèmes mythologiques de Merzin compléteront ces témoignages. Le premier est intitulé « la Pommeraie; » le second a pour titre « les Marcassins. » Ces animaux figurent dans l’un et dans l’autre, et le barde les instruit, absolument de la même manière que le vieux sanglier instruit ceux du poème armoricain. L’épithèle d’intelligents et d’éclairés qu’il leur donne, le nom de sanglier et de poëtes des sangliers, dont d’autres bardes gallois du sixième et même du treizième siècle s’honorent, ne permettent pas de se méprendre sur le sens naturel de l’expression métaphorique employée par Merzin. C’est évidemment à ses disciples bardiques qu’il s’adresse.

« Pommiers élevés su» la montagne, dit-il , dans une invocation aux arbres sous lesquels il instruit son élève ; ô vous, dont j’aime à mesurer le tronc, la croissance et l’écorce ; vous le savez : j’ai porté le bouclier sur l’épaule et l’épée sur la cuisse ; j’ai dormi mon sommeil dans la forêt de Kelidon[3] ! »

Puis s’adressant à son disciple, il ajoute: «Écoute-moi, cher petit marcassin, toi qui es doué d’intelligence, entends-tu les oiseaux? comme l’air de leurs chants est gai[4] ! »

Ailleurs, il l’instruit et, chose digne de remarque, chacune des strophes de sa leçon commence par la formule doctorale qu’on vient d’entendre, de même que chacune des parties de la leçon de notre druide à son élève débute par les vers impératifs qu’on a lus

« Ecoute-moi, cher petit marcassin, dit-il, petit marcassin intelligent, ne va point fouir à l’aventure, au haut de la montagne ; fouis plutôt dans les lieux solitaires, dans les bois fourrés d’alentour... » Sans insister davantage, je conclus que le symbole


  1. Guillelmus Malmesburiensis, Antiquitates Eecclesiae Glastonbury, Gale, p. 295.
  2. Liber Landavensis. Vita Dubricii, p. 295.
  3. Myvyrian, t. I, p. 150.
  4. Ibid., p. 153.