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MORT DE PONTCALEC


— DIALECTE DE CORNOUAILLE —




ARGUMENT


Les fils de ces hommes qui au seizième siècle prirent les armes pour affranchir leur pays de la souveraineté étrangère devaient, au dix-huitième, se lever deux fois pour la même cause. La conspiration de Cellamare eut un plus grand caractère de simplicité dans ses motifs et de précision dans son objet que la Ligue ; elle fut purement nationale. Se fondant sur la violation de leurs franchises par le Régent, dont le but était de détruire toute résistance parlementaire, les Bretons déclarèrent nul l’acte de leur union à la France, et envoyèrent au roi d’Espagne, Philippe V, des plénipotentiaires chargés d’entamer des négociations ayant pour base l’indépendance absolue de la Bretagne. La plus grande partie de la noblesse et les populations rurales se liguèrent contre la France ; la bourgeoisie seule resta en dehors du mouvement national. Elle était, dit M. Rio, entièrement dévouée au Régent et déjà presque toute étrangère au pays ; les mots de droit et de liberté n’étaient inscrits que sur le gonfanon des gentilshommes[1].

La conspiration échoua, comme on sait. Quatre des principaux chefs, savoir : Pontcalec, du Couëdic, Montlouis et Talhouet-le-Moine, furent pris et traités avec le plus dur mépris des formes judiciaires ; le Régent, désespérant d’obtenir un arrêt de mort de leurs juges naturels, les livra à une cour martiale ; un étranger, un Savoyard, la présidait. Mais le peuple, indigné, réforma le jugement, et il fallut toutes les horreurs de 95 pour faire oublier aux Bretons les tribunaux extraordinaires et les dragonnades de 1720. L’élégie du jeune Clément de Guer-Malestroit, marquis de Pontcalec, décapité à Nantes, à l’âge de vingt et un ans, sur la place du Bouffay, avec les trois braves gentilshommes que nous avons nommés, témoigne de l’esprit de la conjuration et de la sympathie populaire qui adoucit leurs derniers instants.

  1. 1 Histoire d’un collège breton sous l’Empire, p. 10.