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XV


LE FAUCON
— DIALECTE DE CORNOUAILLE —




ARGUMENT


Geoffroi Ier, duc de Bretagne, était parti pour Rome, laissant le gouvernement du pays à Ethwije, sa femme, sœur de Richard de Normandie. Comme il revenait de son pèlerinage, le faucon qu’il portait au poing, suivant la coutume des seigneurs du temps, s’étant abattu sur la poule d’une pauvre paysanne et l’ayant étranglée, cette femme saisit une pierre et tua du même coup le faucon et le prince (1008). La mort du comte fut le signal d’une effroyable insurrection populaire[1]. L’histoire n’en dit pas la cause; la tradition l’attribue à l’envahissement de la Bretagne par les étrangers que la duchesse douairière, veuve de Geoffroi, y attira, aux vexations qu’ils exercèrent contre les paysans, et à la dureté de leurs agents fiscaux. On chante encore dans les Montagnes Noires une chanson guerrière sur ces événements et j’en dois une version à un sabotier du pays. Singulière coïncidence! je l’ai entendu pour la première fois sifflera un jeune bouvier qui menait son bœuf au boucher. L’air, me dit-il, est celui de la circonstance, et on ne peut l’entendre sans pleurer.




Le faucon a étranglé la poule, la paysanne a tué le comte; le comte tué, on a opprimé le peuple, le pauvre peuple, comme une bête brute.

Le peuple a été opprimé, le pays a été foulé par des envahisseurs étrangers, par des envahisseurs des pays Gaulois, que la Douairière a appelés comme la vache le taureau.


  1. Post mortem Gaufridi ducis :... Britanni in seditionem versi, Lella cominoverunt. Nam rustict insurgentes contra dominos suos congregantur. (Acta sancti Gildæ Ruynensis. D. Morice, Historire de Bretagne, Preuves, T. I, col 335.)