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CHANTS POPULAIRES DE LA BRETAGNE.

« Et la fiancée disait ce jour-là : Dites-moi, pourquoi les cloches sonnent-elles ainsi ?

— C’est la coutume de notre île que chaque jeune amant sonne en l’honneur de la fiancée. — Oh ! la danse ! etc.

« Mais nous n’osons te le cacher, ton fiancé, sire Olaf, est mort. Nous venons de ramener son cadavre. — Oh ! la danse ! la danse ! Comme on danse bien sous la feuillée !

« Le lendemain, quand le jour parut, il y avait trois cadavres dans la maison de sire Olaf. — Oh ! la danse ! la danse ! etc.

« C’étaient sire Olaf, sa fiancée, et sa mère, morte de douleur[1]. »

Trois ballades smaalandaises, dont le héros s’appelle Magnus, lui font perdre la raison :

— Chef Magnus, chef Magnus, dit la fée, garde-toi bien de répondre non ! Prends-moi pour ton épouse ; ne me refuse pas, ne me refuse pas. Je te donnerai tant d’or et tant d’argent !

— Je suis fils du roi, je suis jeune et brave… ; je ne t’épouserai pas.

— Oh ! chef Magnus, chef Magnus, prends-moi pour épouse ; ne me dis pas non ! ne me dis pas non !

— Qui es-tu… pour vouloir m’épouser ? Tu n’es pas chrétienne !

— Chef Magnus, chef Magnus, ne me dédaigne pas, ou tu deviendras fou, et tu resteras fou toute ta vie. Ne me dis pas non ! — ne me dis pas non !

La ballade servienne de Marko et de la Wila suppose, comme la ballade bretonne, que l’on ne trouble pas impunément les eaux consacrées aux fées.

« Garde-toi, crie une voix au prince Marko, qui chasse et qui a soif ; garde-toi de troubler les eaux du lac, car la Wila du gué sommeille sur ses ondes, et son île flotte sur les eaux vertes. Malheur au héros qui l’éveille ! Malheur au cheval qui trouble les eaux de son lac ! La Wila en exige un terrible péage : elle prend au héros ses deux yeux, et au cheval ses quatre pieds[2]. »

Nous pourrions citer beaucoup d’autres chants populaires qui ont du rapport avec le nôtre ; mais nous n’en avons trouvé aucun aussi complet ; nous le croyons ancien, car il nous paraît très-probable que chacune de ses strophes était primitivement composée de trois vers, comme le sont encore la 1e, la 2e la 5e, la 17e, la 22e la 25e, la 24e et la 36e. Cette forme rhythmique passe, on le sait, pour le caractère certain d’une haute antiquité ; elle a été employée par la plupart des bardes gallois du sixième siècle, et on n’en trouve que peu d’exemples depuis le douzième.

Je remarque qu’elle a disparu dans la rédaction vannetaise de notre pièce, publiée par M. Dufilhol, à la fin de son roman de Guionvac’h, d’après la tradition de Ploemeur, où l’on a localisé et rajeuni l’aventure de Nann, en rappliquant à la mort tragique d’Alain de la Sauldraye, poursuivant la biche de Sainte-Ninnok. Voir l’Itinéraire de Nantes à Brest, de M. Pol de Courcy, p. 153.

  1. Swenska Viser III, p. 158 et l65 Danske Viser I, 138.
  2. Vulks Danilza, 4e partie, p. 39.