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cuir. La vie de cet homme jusque-là avait été un rêve et un désenchantement. Son rêve était une chimère, son désenchantement la réalité.

Dès son jeune âge, il avait logé dans un coin de son cœur l’image de l’adorée. L’adorée, c’était « la Frrânce,» la France chevaleresque, idéaliste, la France qu’il n’avait encore vue qu’en songe, mais qu’il se promettait bien d’aller voir. Il avait fait vœu que, lorsqu’il y mettrait les pieds, son premier geste en débarquant sur les quais de Calais ou du Havre serait de se jeter à plat ventre au risque de passer pour fou à lier, et de donner à la terre de France le doux baiser qu’un fils doit à sa mère.

Son imagination peuplait l’air ambiant de visions tricolores. Il avait dû, dans ses années de collège, passer de longues heures sur les remparts de Québec, interrogeant avidement l’horizon dans l’espoir d’y voir poindre les couleurs de France, à l’instar du vieux soldat de Carillon chanté par Crémazie.

Dis-moi, mon fils, ne paraissent-ils pas ?

Ce fut sans doute le plus beau jour de sa jeu-