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ment accompli, c’est de substituer à cette foi impuissante une doctrine meilleure et plus efficace, celle du Nirvâna.

À ce premier fait, s’en joint un autre qui n’est pas moins certain, et qui n’est pas moins péremptoire, bien qu’en général on ne paraisse pas en tenir assez de compte. Il n’y a pas la moindre trace de la croyance à Dieu dans tout le bouddhisme, et supposer qu’il admet l’absorption de l’âme humaine dans l’âme divine ou infinie, c’est une supposition toute gratuite, qui n’est pas même possible dans la pensée du Bouddha. Pour croire que l’homme peut se perdre en Dieu, à qui il se réunit, ne faudrait-il pas commencer par croire en Dieu lui-même ? Mais c’est à peine si l’on peut même dire que le Bouddha n’y croit pas. Il ignore Dieu d’une manière si complète qu’il ne cherche même pas à le nier ; il ne le supprime pas ; il n’en parle pas, ni pour expliquer l’origine et les existences antérieures de l’homme, ni pour expliquer sa vie présente, ni pour conjecturer sa vie future et sa délivrance définitive. Le Bouddha ne connaît Dieu d’aucune façon ; et tout entier à ses douleurs héroïques et à ses sympathies, il n’a jamais porté ses regards ni si haut ni si loin. Le Bouddha étant sans Dieu, comment a-t-il pu jamais absorber en Dieu l’âme humaine, et faire consister le Nirvâna dans cette absorption ?