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tuation des esprits au 28 au soir ! avec quelle rage on regardait tomber l’ombre, et l’impassible aiguille marcher vers la nuit comme dans les jours ordinaires ! Ce qu’il y a de plus singulier dans cet épisode, c’est qu’on a pu le remarquer à la même heure, dans différens quartiers ; ce ne fut pas une idée isolée, un caprice d’exception, mais un sentiment à peu près général.


12. Voilà Paris, quelle lugubre teinte !

À neuf heures du soir, par une belle nuit d’été, Paris sans réverbères, sans boutiques, sans gaz, sans voitures, offrait un tableau unique de désolation. À minuit, avec ses pavés amoncelés, ses barricades, ses murs en ruines, ses mille voitures échouées sur la boue, ses boulevards dévastés, ses rues noires désertes, Paris ne ressemblait à rien de connu ; Thèbes et Herculanum sont moins tristes : pas un retentissement, pas une ombre, pas un vivant, hormis l’ouvrier immobile qui gardait la barricade avec son fusil et ses pistolets. Pour cadre à tout cela, le sang de la veille et l’incertitude du lendemain.


13. Attendons pour fanal les bombes de Vincennes.

Qu’il était digne d’eux, ce dernier effort ! bombarder Paris pour sauver la cour ! Heureusement, les braves artilleurs de Vincennes, si Français, si nationaux, se seraient révoltés d’indignation contre l’ultimatum de Saint-Cloud.


14. Lafayette a paru comme un drapeau vivant.

Ce nom produisit un effet électrique ; quand les Parisiens revirent ce grand homme à leur tête, ils ne doutèrent plus de l’heureuse issue du combat.