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muette et riante dans le jardin, au milieu des huées de la foule. Le tambour de retraite battit, on ferma les grilles avant l’heure, mais la fermentation continua sous les galeries ; des groupes nombreux se formèrent : les cris à bas les ministres ! se firent entendre ; un jeune homme monta sur un banc, et cria : Chez Polignac ! chez Polignac ! À l’instant le Palais-Royal fut évacué. La foule se précipita vers l’hôtel du ministre, ses vitres furent cassées devant la sentinelle : c’était la préface du grand ouvrage, le petit prélude d’un grand lendemain.


3. Tombent en provoquant de publiques risées.

Nous ne nous sommes pas rigoureusement asservis à l’ordre historique des faits, c’est un privilége de poëte.

La dévastation des armoiries royales eut lieu le 28 ; ce tableau fut comme une pièce gaie entre deux tragédies. Il était six heures du matin, le temps était magnifique, toutes les figures riaient ; à ce moment du jour où Paris est désert, rien n’était plus curieux que de voir cette ondulation de foule vivante, on aurait dit une fête de l’aurore. Tout-à-coup, dans la rue Neuve des Petits-Champs, un écusson royal est abattu ; ce fut le signal de la destruction ; dans les rues Vivienne, Richelieu, Montmartre, les marchands brevetés s’exécutèrent de la meilleure grâce ; à chaque chute des fleurs proscrites, le peuple riait et battait des mains ; aucune ombre d’opposition ne se manifestait, les agens de la police s’étaient évanouis ; les Suisses buvaient dans leurs casernes, les gendarmes se cachaient pour la première fois de leur vagabonde vie ; les braves troupes de ligne, postées au corps-de-garde, étaient mornes, leurs chefs soucieux : ils étaient peuple déjà.


4. … Lambesc et Besenval.

Les stupides courtisans ne cessaient de rappeler à leur roi ces mémorables charges du prince de Lambesc, qui dissipèrent