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Les deux rives, cependant, correspondent exactement l’une à l’autre ; quand les eaux ont creusé d’un côté un petit enfoncement, ou formé un coude en déviant de leur cours ordinaire, vis-à-vis de ces déplacements, une pointe de terre s’avance, comme pour combler le vide ou suivre toutes les sinuosités du cours, de sorte que si les bords pouvaient se refermer, toutes les parties s’adapteraient les unes aux autres et s’ajusteraient aussi hermétiquement qu’une boîte.

De chaque côté, sont bâties les habitations et c’est plaisir que d’admirer ces villages si proprets, si bien bâtis, aux maisonnettes enfouies pour la plupart derrière d’épais rideaux de verdure.

On a le culte des arbres à la Beauce. Les bosquets n’y sont pas rares et, par endroits même, les routes sont ombragées par des rangées d’ormes qui s’élèvent droits dans les airs, et font retomber comme une ombrelle, leur gracieux feuillage, découpé à jour.

Partout, des prairies bien cultivées, et, le sommet ou le versant des côteaux se couvrent en été d’une belle et riche moisson.

Quelles belles promenades nous avons faites à travers ces campagnes avec « Minuit, » le vaillant cheval noir qui nous conduisait si gaillardement.

Dans les champs, les femmes arrachaient déjà le lin qu’elles filent ensuite pendant les soirées d’hiver ; les petits enfants, accourus au bord du chemin par le bruit de notre voiture, relevaient des deux bras les broussailles de leurs cheveux et nous regardaient d’un air curieux.

Saint-Joseph est le chef-lieu du comté. Comme M. le shérif Taschereau, avec une amabilité et une courtoisie charmantes, nous faisait visiter le palais de justice, la cour, la prison, nous entendîmes dans les salles des petits jurés la sentence d’un individu accusé d’avoir frappé un voisin à coups de hache. Rien que de voir la