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ne vint troubler ma sérénité quand j’eus aperçu le sourire malicieux qu’il avait peine à dissimuler.

Le directeur de la mine me reçut avec une bienveillante cordialité et me donna pour guide Joe Egan, dont le nom et le langage le rangeaient, sans hésitation, au nombre des fils de la blonde Hibernie.

À ce moment, deux jeunes étudiants de l’Université Harvard arrivèrent sur les lieux et se joignirent à moi pour cette expédition.

Il fallait d’abord descendre au fond du puits, c’est-à-dire à une profondeur de 750 pieds ! Maintenant que c’est fait, je puis bien avouer un certain battement de cœur, ressenti en pénétrant dans cette boite étroite et oblongue, qui nous descendit dans les entrailles de la terre avec une rapidité vertigineuse.

Les parois du puits sont recouvertes de feuilles de fer, car si une petite pierre, fût-ce même un gravier, venait à se détacher et à tomber de cette hauteur, sur la tête d’un visiteur, il en aurait immédiatement le crâne perforé.

Le léger choc que fit, en effleurant le sol, notre ascenseur d’un nouveau genre, nous avertit que nous venions d’arriver. Nous sortîmes de la boîte un peu ahuris comme si nous nous fussions tout à coup trouvés transportés dans une autre planète.

Quelle obscurité, mon Dieu ! quand j’y pense ! On ne saurait imaginer de si profondes ténèbres ; celles que nous donnent les ombres de la nuit n’y sont pas comparables.

Le premier soin de notre guide fut de nous procurer des lampes comme celles dont les mineurs se servent pour s’éclairer ; ce sont de petits bidons en ferblanc, de la grosseur et de la longueur du pouce, dans le bec desquels brûle une mèche en coton.

On voit en traversant ces longs corridors, taillés dans le roc, luire à distance ces lumières qui ressemblent à des étoiles ; elles passent, se croisent, brillent un instant, puis disparaissent comme des étoiles qui ont filé.