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même à leurs cocktails (ah ! le vilain mot), plutôt que de les soumettre à cette épreuve.

Aussi, je crois qu’il est assez rare, et pour plus d’une raison, que les dames se fassent escorter de la sorte dans leurs tournées d’emplettes.

Généralement, elles aiment mieux tenir les maris dans l’ignorance du prix qu’a coûté tel ou tel article.

S’ils en étaient informés, la plupart d’entre eux feraient une tête, je vous l’assure !

On n’a pas idée, à moins d’être du métier, de la valeur de ces choses-là. Aux yeux de celui qui ne s’y connaît pas, ça n’a l’air de rien que cette boucle, ce nœud de gaze légère, qui, toute chiffonnée, ne tiendrait pas dans le creux de la main ; et pourtant la somme qu’on en demande fait ouvrir les yeux.

Au fond, vous savez, en y réfléchissant, c’est encore moins dispendieux que les p’tits coups.

Nous disions donc qu’il est préférable pour les femmes de faire seules leurs achats.

Cependant, malgré leur bonne volonté, quelques-unes ne le pourront jamais, savez-vous pourquoi ?

Parce qu’elles n’ont jamais dans leur bourse un sou dont elles puissent disposer. Parce que, pour un vingt-cinq sous, elles sont obligées de tendre la main.

C’était probablement un cas analogue qui avait amené la personne dont je parlais plus haut à se faire accompagner de la sorte.

Il était là pour payer la note et, si j’en juge par l’amoncellement de paquets sur le comptoir, elle a dû être forte.

On est certain d’avance que, si l’on demande à la maison l’argent nécessaire, on n’obtiendra rien, ou que, si les cordons de la bourse se délient quelque peu, ce sera de bien mauvaise grâce et après force récriminations. Tandis que, pris à l’improviste, et dans un lieu