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J’aime à me figurer cet intérieur charmant, à l’orner de jolis tableaux, de tentures gracieuses, de bibelots élégants ; je vois, dans mon esprit, le feu de grille qui jette ses reflets lumineux sur les murs, et les bons fauteuils qu’on a roulés autour des petites tables chargées de livres et des journaux du soir… Je me plais surtout à peupler ces lieux de cœurs qui s’aiment, et je me prends à rêver que le bonheur ne peut déserter un nid aussi moelleux que celui-là…

C’est ainsi que l’on va flânant, interrogeant chaque chose, chaque figure nouvelle, qui toujours vous diront quelque histoire.

Vous l’avez remarqué comme moi, n’est-pas ? on a souvent de ces sympathies inconscientes qui nous attachent à ceci plutôt qu’à cela, à telle personne plutôt qu’à telle autre, sans cause apparente ou sans motif raisonné.

Chaque fois que je descends à la ville, il m’arrive de faire un détour pour mettre sur mon chemin certain petit logis de briques rouges, dont les fenêtres sont garnies des plus frais rideaux imaginables.

Ce ne sont pas des rideaux de riche dentelle, des tissus d’un dessin artistique, mais tout simplement une mousseline chaste et blanche comme la neige, avec de petits pois emprisonnés dans la gaze transparente.

Ils retombent légers et gracieux, attachés de chaque côté par un nœud de ruban. Tout cela est si simple, si peu prétentieux et pourtant si joli que, rien qu’à le voir, l’esprit en conserve une agréable impression.

C’est une femme, — jeune fille ou jeune épousée, — qui a su choisir cette mousseline et la poser avec tant de grâce ; je devine ses doigts de fée dans chacun de ses plis et son goût à la fois relevé et délicat.

Sur l’appui de la fenêtre, des plantes vertes s’étalent et grandissent au soleil ; cela forme un coin charmant,