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parentes au pied du côteau, me sont connus depuis longtemps.

Mais il y a tant de joie à revoir les lieux qu’on aime, tant d’émotion douce à saluer ces témoins des anciens jours et à leur dire :

— C’est moi, m’avez-vous oubliée ?

Chaque année, ils nous voient reparaître avec un bagage nouveau d’inconstances et d’infidélités, le front plus pâle, les lèvres moins souriantes, tandis qu’eux toujours immuables, disent à leur tour :

— Ce n’est pas nous qui avons changé… Pourquoi nous avoir quittés ?

D’ordinaire, ces matins étaient si tranquilles et si calmes, à peine troublés par le cri des moissonneurs, qui montait affaibli jusqu’à moi. Dans le lointain, s’ébranlaient de lourdes charrettes, chargées de foin, disparaissant derrière les nombreux monticules pour rentrer je ne sais où, et tout au bas de l’avenue, bourdonnaient des mouches besogneuses et des grillons sous l’herbe.

Puis, comme chacun ne voulait rien perdre de ce spectacle, on courait s’installer sur la véranda, où les héliotropes et les résédas nous enivraient de leurs parfums.

Voyez-vous cela d’ici ?

Une longue et spacieuse maison, dont la toiture prolongée s’appuie sur une rangée de piliers ; un tertre de gazon, planté de saules énormes ; un jeu de croquet, bordé de géraniums éclatants ; plus loin, des plates-bandes où croissent des fleurs à profusion, groupées avec un art exquis.

Puis, brusquement, une pente rapide se fait, et tout au bas de la prairie coulent, au pied d’une falaise escarpée, des eaux emportées par un courant très fort.

Je crois vous avoir déjà parlé de toutes ces choses. N’importe ! Je voudrais vous forcer, en les admirant encore, à vous y attacher comme moi.