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Je vous assure que cette conviction vous met un froid dans le dos, même par la température la plus torride.

Je viens d’éprouver un autre frisson, tout à l’heure, quand je me suis aperçue, en venant porter ma copie, que je ne l’avais plus.

Je regarde partout, sur moi, autour de moi ; je retourne, mais inutilement, le petit ridicule que j’ai à la main ; encore un peu, je cherchais jusque dans mon chapeau, à l’instar de ce magister de ma connaissance qui portait sa correspondance dans son couvre-chef.

Après vous avoir expliqué tous les embarras de la composition d’une chronique, vous pouvez penser si j’étais marrie du contre-temps qui me venait d’arriver.

Je l’avais perdue, sans aucun doute. Je ne pouvais pas même imaginer que l’on m’eut volée, car, ça ne rapporte pas grand’chose, allez, des chroniques dans notre pays !

Je ne sais quelle binette a dû faire l’individu qui m’aura trouvée, car, c’est bien un peu de moi-même que j’ai perdu en laissant choir mon manuscrit.

Heureusement, que mes secrets sont toujours bien gardés par mon écriture qui est illisible.

Mais, c’est légèrement contrariant. Avec cela, que, vous eussiez été contents de moi, cette semaine. C’était, certainement, la plus jolie chronique que j’aie encore écrite, je puis bien le dire, maintenant que vous ne la lirez jamais.

Et, vous savez, on ne retrouve jamais deux fois, ces moments d’inspiration.

Quant à en écrire une autre, pour la remplacer ! Jamais de la vie !


Lundi, 30 avril.

Un jour, madame Necker, la mère distinguée d’une fille plus distinguée encore, invita, chez elle, un certain M. de Chastellard.