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Et quel médecin que celui-là ! (du moins au dire de Séraphine.) Aimable, spirituel, courtois, savant, bon chirurgien et habile spécialiste. Toutes les qualités à la fois, quoi !

Il avait été particulièrement charmant avec elle, l’avait complètement rassurée sur le sort de sa cousine, et, finalement, l’avait reconduite jusqu’à la porte de sortie, quand il quittait d’ordinaire ses clients à la porte de son bureau.

Je vous fais grâce des détails interminables de cette entrevue, de la joute de mots spirituels échangés entre le docteur et Séraphine, détails qui, pour le moment n’amusaient guère le mari, comme il était facile de le constater à son air ennuyé.

Une fois, il essaya de changer de conversation en parlant du théâtre. J’essayai de le seconder, mais ma Séraphine était lancée, et rien ne put l’arrêter.

Nous avons dû entendre parler de pilules tout le long du souper.

J’avoue que je me dédommageai un peu en mangeant du gâteau, ce qui a fait dire à Séraphine, ce matin, à ma tante, qu’elle a rencontrée au marché, que j’avais mangé chez elle un énorme gâteau à moi toute seule.

Enfin, le repas prit fin. Nous passâmes à la bibliothèque de monsieur. J’étais sûr que nous avions vidé le sujet du docteur. En effet, il fut mis de côté comme on jette une vieille paire de gants.

Tandis que je me prélassais dans un grand fauteuil, Séraphine eut, tout à coup, une idée sublime :

— Tiens ! s’écria-t-elle, pour tuer le temps, je vais te lire les lettre d’amour que j’ai reçues de mes admirateurs, quand j’étais jeune fille.

Je la regardai tout abasourdie :

— Mais, est-ce qu’on ne détruit pas tous ces billets-là ayant de se marier ?