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Il est vrai qu’on doit admettre facilement que rien n’est plus seyant au sexe fort qu’un habit de gala. C’est ce qui lui permet de se montrer avec tous ses avantages et donne à sa personne ce cachet de distinction et d’élégance qui n’a jamais rien de déplacé.

Un homme d’esprit me disait, l’autre jour :

— L’habit noir a le suffrage populaire féminin ; les femmes, les jeunes filles, nos épouses et nos sœurs se déclarent hautement en sa faveur. Il n’y a que nos mères, qui par principe d’économie, parce qu’il faut renouveler le linge blanc trop souvent, le regardent un peu de travers.

On a déclaré, séance tenante, que la raison n’était pas suffisante, et, qu’en toute occasion, l’habit noir était fort recommandable.

Il résulte donc, en fin de compte, que les torts et les exagérations sont encore de notre côté. Pourtant nous ne sommes que les victimes des circonstances. On se dit : Si je ne mets pas une robe décolletée et des gants jusque par-dessus les coudes, je ne serai pas comme les autres…

Et, chacune se faisant ce raisonnement en son particulier, il arrive que toutes arrivent attifées comme aux soirs de grandes fêtes.

Voilà comment il se fait que les soirées intimes sont rares, que les amusements n’ont rien de spontané et se classent méthodiquement comme les danses sur un carnet de bal.

C’est pourtant si bon ces réunions franches et cordiales où l’on s’aborde sans façon, se groupant autour d’une table, d’un piano, discutant les actualités, le dernier roman, se donnant comme un luxe le plaisir de parler comme on pense, librement, sans les lieux communs des conversations banales.

C’est étonnant comme vous trouverez des gens de mon avis.