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En effet, ce n’était pas tout ce que la sévérité des règles monastiques pouvait désirer, et je ne m’exposai plus à ce qu’on détruisît ma légende ou qu’on doutât de son authenticité…

Depuis, bien des jours ont passé. D’autres histoires, ou plus réelles ou plus fictives encore, sont venues s’ajouter à la touchante histoire de Madeleine, et je les garde toute dans mon âme : petites lumières qui ne s’éteignent jamais !…


Lundi, 12 juin.

C’est pour les sceptiques qui ne croient pas aux revenants que j’écris cette chronique.

Ce n’est pas une histoire du temps passé, où les témoins, morts et enterrés, ne peuvent plus répondre aux interrogations des vivants, mais un fait d’occurrence récente, arrivé dans une de nos institutions les plus remarquables de Montréal.

Je n’aime pas, pour ma part, ces anecdotes qui ne donnent, ni les noms, ni l’endroit, où les choses se sont passées ; cela laisse planer quelque soupçon sur leur authenticité. Il n’y a qu’un nom que je ne vous donnerai pas, bien que j’en aie grande envie pour lui jouer un tour, et c’est celui de l’intéressant narrateur qui m’a raconté le trait.

Donc, il n’y a pas bien longtemps on amenait à l’Hôtel-Dieu un brave fils de la Verte Erin dont l’état semblait des plus précaires.

Il y a, paraît-il dans la vaste enceinte des dames Hospitalières, une chambre exclusivement réservée aux Irlandais, que l’on appelle, pour cette raison, salle St-Patrice. La bonne sœur chargée particulièrement du soin de cette salle est, elle aussi, une fille de la blonde Hibernie, qui vint au Canada, encore toute enfant, avec des immigrants de son pays dont le nombre fut si horriblement décimé par le typhus, quelque vingt ans passés.