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dans l’espèce de stupeur créée par cette interruption soudaine, une voix aigre et perçante, emportée par la chaleur de la discussion, s’écrie :

— Nous les faisons frire dans la graisse !

On parlait beignets.

L’artiste était vengé.


Lundi, 13 mars.

Lundi dernier, en parlant du nombre de langues étrangères qui s’enseignent dans quelques-unes de nos institutions, je regrettais qu’on ne substituât pas à la plupart de ces idiomes, l’étude du latin, ajoutant que les femmes du moyen-âge, pourtant si arriérées dans leur éducation auraient eu honte de ne pas comprendre les textes de leur missel.

D’où quelques personnes ont conclu que je recommandais l’étude du latin seulement pour prier Dieu, et, qu’à mon avis on ne devrait plus traîner à l’église que des Psautiers de David ou autres livres de ce genre.

Loin de moi une telle pensée. Les meilleurs livres à apporter au saint lieu c’est son esprit et son cœur ; c’est encore là où se trouvent les meilleures prières, les plus vraies et les plus sincères.

Dans ce siècle où tout est surchargé, on dirait qu’on va jusqu’à emprunter, pour prier Dieu, les expressions exagérées de nos romans. L’amour, la douleur y sont représentés tels qu’ils devraient être, probablement, mais tels qu’ils ne sont que rarement.

Je déteste ces exagérations, parce qu’elles ne sont pas les notes justes de nos sentiments.

Je me rappelle surtout certaine amende honorable qui commence par ces mots :

« C’est le front prosterné dans la poussière, la bouche pleine de sanglots, le cœur broyé et humilié que je viens devant vous, Seigneur… etc. »