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En effet, le bon sens pratique de l’enfant ne comprenait rien à cette absurde manière. Cette manie peut aller de pair avec celle de jeunes mariés de quinze jours, qui s’appellent mutuellement : mon vieux, ma vieille.

Vous les entendez à chaque instant : mon vieux a fait ceci, mon vieux a fait cela, j’ai dit çà ma vieille, etc., etc.

Si l’amour doit se manifester de cette façon, il vaudrait mieux, comme dans la chanson : « s’aimer sans se le dire. »


Lundi, 6 février.

Un journal de cette ville suggérait au gouvernement provincial, l’autre jour, d’imposer une taxe de dix dollars à tout homme non marié, ayant plus de trente ans et retirant en salaire au moins cinq cents piastres par année.

Il n’y a pas de doute que, si l’on veut remplir le coffre du trésor public, voilà un excellent moyen. Bientôt, on aurait même des capitaux à placer dans les banques étrangères. Car le nombre des vieux garçons continue toujours d’augmenter ferme, en dépit de toutes les petites flèches qu’on leur décoche à droite et à gauche.

Maintenant, reste à savoir si l’on a trouvé, dans cette taxe prélevée sur nos vieux lions découronnés, le moyen de réduire leur chiffre toujours grossissant.

La persécution affermit plutôt une œuvre qu’elle ne l’ébranle ou ne la fait disparaître.

C’est une opinion généralement admise que, plus longue a été la guerre contre les adeptes d’une idée nouvelle, plus cette idée a de chances de triompher définitivement.

Dieu me garde de vouloir faire des héros des vieux garçons, ou de les faire poser avec le nimbe et la palme des martyrs. Ce serait d’un drôle, hein ?

Toutefois, je ne comprends pas bien qu’on leur fasse une guerre aussi acharnée. Eh ! mon Dieu, nous som-