Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’en charger, les jouets un peu défraîchis des années précédentes, ceux que les mains capricieuses ont maniés, puis jetés de côté, les livres d’images trop feuilletés qui ne plaisent plus à la clientèle élégante, pour être distribués parmi ces pauvres déshérités. Quel beau jour de l’an ce serait pour tout le monde : pour les bienfaiteurs comme pour les petits protégés !


Lundi, 24 décembre.
LA PREMIÈRE VEILLE DE NOËL.
(Imité de l’anglais.)

La sombre nuit étendait encore ses voiles sur la ville aux sept collines, la maîtresse du monde civilisé, la belle, la grande, la majestueuse Rome.

Le roulement des chariots allait s’affaiblissant dans l’espace et le bruit des sandales ne résonnait plus sous les portiques de marbre du Forum, quand, sur la terrace d’un palais des Césars, parut une jeune fille. Elle était revêtue de la blanche tunique de lin, à sa taille une ceinture de couleur pourpre : svelte et gracieuse cette jeune fille, au visage d’un ovale si parfait, aux yeux comme les anges doivent les aimer.

Elle vint s’appuyer sur une des colonnettes de porphyre, dont la balustrade était garnie, et fixa longuement son regard mélancolique sur les étoiles sans nombre qui scintillaient au-dessus de sa tête.

Son œil devint humide, son sein ému se gonfla de soupirs, et, de ses lèvres entre ouvertes, semblables à une grenade mûrissante, elle exhala les plaintes qui remplissaient son âme :

« Oh ! dites-moi, petits oiseaux dorés des cieux, si vous avez une voix : dites-moi, pourquoi sommes-nous, pauvres femmes, condamnées à courber le front sous le