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34 Conspiration des Sophistes

sion; ces bonnes âmes me bénissent et me perdent. C’est lui, dit -on, c’est son style, c’est sa manière. Ah , mes frères! quels discours funestes! Vous devriez au contraire crier dans les carrefours, ce n’est pas lui; il faut qu'il m y ait cent mains invisibles qui percent le monstre, et qu'il tombe sous mille coups redoublés."(Lett. à d’Alemb., 1 Mai 1768.)

D’Alembert excellait dans cet art du secret et de cacher sa marche, aussi Voltaire le recommandait-il aux frères comme le vrai modèle à suivre et comme l’espoir du troupeau. "Il est hardi leur disait-il, mais il n’est point téméraire; il est pour faire trembler les hypocrites (entendez les hommes religieux) sans donner prise sur lui." (Lett. de Volt, à Thiriot, 19 Nov. 1760.)

Non seulement Frédéric approuvait ce secret et ces ruses (Lett. à Volt, du 29 Juin 1771 ), mais nous le verrons appliquer lui-même tous les artifices de sa ténébreuse politique aux moyens de faire réussir la conjuration.

Union des conjurés

Dans tout complot encore, l’union a conserver parmi les conjurés n’est pas moins essentielle que le secret; aussi leur était-elle bien spécialement et bien souvent recommandée. Leurs instructions sur cet objet portent entre autres : «O mes philosophes! il faudrait marcher serrés comme la phalange Macédonienne, elle ne fut vaincue que pour avoir été dispersée. Que les philosophes véritables fassent une confrérie comme les Francs-Maçons; qu’ils s’assemblent, qu’ils se soutiennent, qu’ils soient fidèles à la confrérie. Cette Académie vaudra bien mieux que l’Académie d’Athènes et que toutes celles de Paris.» (85 Lett. de Volt. à d’Alemb., an 1761, et 2 Lett., an 1769.)

S’il arrivait quelque division entre les conjurés, le chef ne manquait pas de leur écrire pour les apaiser; alors il leur disait : «Ah! pauvres