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DE l’impiété. Chap. III. 51

suivent. L’usage qu’ils font de ces diverses ruses est assez fréquent pour qu’on voie le soin de se ménager des explications, des excuses ; et s’ils sont surpris , il est rarement assez énigmatique pour avoir besoin d’étude.

Il y a cependant quelques-unes de leurs lettres plus difficiles à déchiffrer, telle que celle-ci , écrite par Voltaire à d’Alembert le 3o Janvier 1764 : " Mon illustre philosophe m’a envoyé la lettre d’Hippias B. Cette lettre de B. prouve qu’il y a des T. et que la pauvre littérature retombe dans les fers dont Malesherbes l’avait tirée. Ce demi-savant et demi-citoyen, d’Aguesseau, était un T. Il voulait empêcher la nation de penser. Je voudrais que vous eussiez vu un animal nommé Maboul. C’était un bien sot T. chargé de la douane des pensées sous le T. d’Aguesseau. Ensuite viennent les sous T. qui sont une demi -douzaine de gredins, dont l’emploi est d’ôter , pour quatre cents francs par an, tout ce qu’il y a de bon dans les livres. »

On voit bien ici que ces T. tiennent la place du mot Tyran, et que de ces prétendus tyrans, l’un est le Chancelier d’Aguesseau, et le second, Maboul, l’intendant de la librairie. On voit que les sous T. ou sous-tyrans ne sont que les censeurs publics, dont la pension était en effet de quatre cents livres. Mais il est difficile de deviner quel était cet Hippias B., apparemment aussi quelque autre tyran qui ne voulait pas laisser imprimer et vendre librement tous ces livres, dont le poison préparait les peuples à renverser l’autel et le trône. Mais peut-on ne pas s’indigner quand on voit un homme tel que le chancelier d’Aguesseau, l’honneur de la Magistrature, traité de tyran, de demi-citoyen, de demi-savant ! Au reste, c’est encore beaucoup que Voltaire ne l’outrage pas davantage; car dans toute cette correspondance, il faut s’attendre à le voir, lui et d’Alembert, n’épargner ni les titres