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heure après la retraite. Tous les dimanches et fêtes, il fallait aller à la messe du régiment. Pour lui, colonel, il ne manquait jamais les vêpres et encore moins le salut, de sorte que les autres troupes de lignes nous appelaient le régiment des capucins, ce qui de temps en temps nous attirait des disputes où plusieurs furent tués sans compter les blessés. Je me rappelle qu’un jour j’étais le plus ancien de chambrée, parce que le caporal était de garde, le sergent-major dont j’ai parlé voulut me faire lire la prière, je lui fis réponse que je ne savais pas lire : il me fit mettre en prison quinze jours. Du reste, le régiment était assez tranquille et bien entretenu.

Au bout de mes huit ans, jour pour jour, j’ai eu mon congé. J’essuyai cependant une petite difficulté au moment où l’on devait me délivrer. Il m’était dû de mes écoliers une quarantaine de livres et je leur en devais une trentaine. Ceux à qui je devais furent chez le major pour être payés : cela était juste. Le major me fit appeler et me dit que je n’aurais pas ma cartouche si je ne payais mes dettes. Je lui fis réponse que je ne demandais pas mieux de payer ce que je devais, mais qu’il était de toute justice qu’il me fît payer ce qui m’était légitimement dû. Sur quoi, il