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Nous fîmes contenance et, comme il était nuit, ils ne pouvaient savoir combien nous étions. Ils eurent peur par deux coups de fusil que nous tirâmes en l’air, de manière qu’ils se mirent aux barrières et les fermèrent. J’y fus seul, armé ; mes autres camarades, au nombre de trente, étaient en bataille vis-à-vis de la barrière et à une demi-portée de fusil, mais ils faisaient plus de tapage que s’ils avaient été deux cents. J’entrai dans le corps-de-garde des employés et leur dis que nous étions militaires qui nous étions résolus à faire ce métier, afin de nous procurer de l’argent pour faire la vie. Le brigadier ainsi que les subalternes nous ouvrirent la barrière, rentrèrent dans leur corps de garde, soufflèrent leur lumière et nous laissèrent passer.

Depuis huit jours, nous manquions à l’appel, de manière qu’on attendait que nous soyons tous rentrés pour nous mettre en prison. Nous restions encore quatre en arrière, qui ne parûmes au détachement que près de Verneuil. Il nous restait à chacun 150 fr. en écus. C’était beaucoup en ce temps-là, et surtout pour des soldats. En arrivant à Verneuil, il était nuit, nous envoyâmes chercher chacun nos amis et plusieurs du grade de sergent ; nous soupâmes tous ensemble. Le sergent de ma compagnie me dit qu’il était obligé de rendre