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pour acheter une épée, mais aucun ne m’en voulait vendre. Je me désespérais. Un de mes insulteurs se détacha de la bande, et bientôt je vis arriver dix ou douze militaires armés de sabres et dont plusieurs avaient des épées. On s’expliqua ; et, remarquant un grenadier assez bien monté en épée, je lui offris un louis de son arme, en ajoutant que je me chargeais de lui faire remettre une lame si je venais à la casser. Il me refusa net et me dit qu’il ne prêtait jamais ses armes surtout contre ses amis. Je lui dis : Votre réflexion est très juste, mais alors empêchez-les d’insulter un homme qui n’a point de quoi se défendre.

Résolus à coucher dans l’auberge, nous donnâmes l’ordre de nous préparer des lits. Les disputeurs se disposaient à partir, mais nous eûmes encore à nous entendre avec eux, car il y avait douze pintes de vin bues, et d’autorité ils voulaient me forcer à les payer : je dis que je payerais mon écot et rien de plus. Alors je soldai trois brocs de vin et l’aubergiste leur fit payer le reste : ils s’en allèrent très mécontents.

Mon ami, au bout d’une heure, me dit : « Il faut nous en retourner à Paris. » Il était marié et avait deux enfants. Enfin, nous décidâmes que nous irions coucher à Paris. Nous avions tous trois chacun