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personne ne pouvait le souffrir, de manière que cela faisait une réjouissance et de grandes risées dans la compagnie. Mais tous ces tours-là ne me vengeaient pas assez.

Il avait une maîtresse qu’il allait voir tous les jours après la retraite, et il restait souvent jusqu’à minuit. Je voulais absolument, à tout prix, me venger. Je choisis pour cet effet un soir qu’il n’y avait pas de lune ; — j’avais aussi une maîtresse qui avait chez elle un grand manteau ; — je parus à l’appel qui se fait après la retraite ; je me couchai comme les autres et je me levai sur les dix heures et demie du soir  ; je sortis doucement et je laissai la porte de la chambrée tout contre ; j’avais mis à la brume mon manteau sous de gros pieux de bois de construction  ; — je le pris et je me munis d’un gros bâton ; je fis faction dans une petite rue où devait passer le sergent ; je le vis sortir ; j’entrai dans une allée et, quand je jugeai qu’il était près de moi, je m’entortillai bien dans mon manteau et je ne mis dehors que le bras droit  ; je tombai sur lui ; je lui détachai cinq ou six bons coups ; je l’étendis, et, comme il criait, et qu’il appelait tant qu’il pouvait «  à la garde  » ! je lui en détachai un autre sur la mâchoire et je le laissai là. Je revins par une autre rue à la caserne. Dans cette