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me prièrent donc de conter un conte. Je me mis alors en fonction et, au bout d’une demi-heure, un de mes camarades de lit qui avait besoin que nous soyons endormis tous pour aller voir sa maîtresse, se mit à me dire que, si je ne finissais pas, il allait me faire taire d’une belle manière. Les autres qui n’étaient pas encore endormis me dirent de continuer. Moi, qui ne me plaisais qu’à être en contradiction, je me mis de plus belle à forcer ma voix qui a toujours été très forte. Lui, voyant que je le faisais exprès, me donna un coup de poing. Me sentant frappé, je le lui rendis. Nous voilà à nous battre jusqu’à ce que le caporal de la chambrée se réveillât et mît le bon ordre et fît finir toute l’histoire. Nous cessâmes notre dispute, mais il me dit que je lui payerais cette scène, le matin. En effet, cinq heures sonnent : il me réveille et me dit de prendre ma baïonnette et qu’il allait me corriger. Il prit un de ses amis, et moi, je réveillai un musicien qui couchait avec nous ; celui-ci ne voulait pas venir, disant que j’étais trop jeune et que cela le compromettrait. Je fus donc obligé de dire : Allons-y, nous deux, nous n’avons besoin de personne. Il ne voulut jamais. C’est alors que je fus réveiller mon camarade avec lequel je m’étais engagé : celui-là ne me refusa pas.